On peut difficilement parler d’IPv6 sans d’abord donner quelques explications sur son prédécesseur, le protocole IPv4.
Commençons par recontextualiser l’utilité de ces protocoles.
Tous les appareils électroniques de notre quotidien (smartphones, ordinateurs, imprimantes, appareils photo, routeurs, objets connectés) qui possèdent une connexion Internet possèdent obligatoirement une adresse IP ( Internet Protocole) propre à lui.
Une adresse IP est une suite de chiffres unique attribuée à tout appareil connecté à un réseau Internet. C’est un numéro d’identification qui permet de localiser l’endroit où se trouve l’appareil Internet. Tout appareil branché à un réseau Iinternet détient forcément une adresse IP.
Le protocole IP gère entre autres,l’acheminement du trafic entre les appareils.
Chaque “noeud” (chez les opérateurs) gère les “routes” qu’il connaît à un instant donné pour atteindre un bout du réseau Internet, selon l’IP que l’on souhaite atteindre.
Vous l’aurez compris : sans ce protocole, nos chers appareils électroniques ne communiqueraient pas.
La version de ce protocole qui existe actuellement et qui a toujours existé est l’IPv4.
Même là où IPv6 est utilisé à l’heure actuelle, c’est en général en parallèle d’IPv4, les 2 protocoles pouvant “cohabiter” sur un même appareil.
Lorsqu’un utilisateur va par exemple sur un site web comme www.leogrid.com, le navigateur cherche l’adresse IP (V4 ou V6 d’ailleurs) correspondant à ce nom (actuellement son IPv4 est 185.255.85.149) et c’est ainsi que le trafic web est échangé (on dit “routé”) à cette IPv4.
Techniquement, cette adresse IP se compose d’une suite de 32 bits (c’est-à-dire 32 zéros ou uns) ce qui permet de créer près de 4,3 milliards d’adresses IP uniques. On l’écrit par commodité sous forme décimale comme 185.255.85.149.
Sauf que depuis sa création en 1970, les choses ont bien changé. Les limites en termes d’évolutivité et de capacité de l’IPv4 ont commencé à se manifester. Il y a eu un décuplement de matériels nécessitant une connexion au réseau Internet, ce qui a engendré une pénurie du nombre d’adresses IPv4 disponibles.
Un détail important à noter est qu’il y a actuellement bien plus de 4,3 milliards d’équipements connectés sur Terre, alors comment est-ce encore possible ? Certaines plages d’IP sont dites “privées”, c’est-à-dire qu’elles ne sont pas adressables (joignables) sur Internet mais servent pour des réseaux locaux (l’intérieur d’une entreprise, le réseau de votre maison derrière votre “box Internet” etc). Ainsi, tous les réseaux d’entreprises et de nos maisons utilisent certaines plages identiques pour le fonctionnement interne de ce réseau local. La plage 192.168.0.x est un exemple souvent connu dans nos maisons. Lorsque ces appareils doivent aller sur Internet, ils “relayent” leur demande à leur “box” (ou routeur), qui elle a réellement une IP “publique”, et c’est la box/routeur qui fait la demande sur Internet et renvoie la réponse sur le réseau interne. On dit qu’elle fait la traduction, nous en reparlerons plus bas. Il existe aussi d’autres mécanismes chez les opérateurs Internet permettant de partager une même IP publique entre plusieurs utilisateurs / appareils. On pourrait dire que beaucoup de subterfuges ont été mis en place sur IPv4. Souvent pour reculer l’échéance de l’adoption massive de IPv6, nous y reviendrons.
Quels changements avec IPv6 ?
Avec l’IP, les informations circulent sous forme de paquets à l’intérieur d’un flux. Le paquet est une unité de transmission de taille donnée. Pour transmettre un message d’un appareil à un autre sur un réseau, le paquet se divise en petits sous paquets, de taille adaptée pour le routage, et qui sont transmis de manière séparée. C’est ce qu’on appelle la commutation des paquets. Ces sous-paquets peuvent emprunter des routes différentes suivant l’état du réseau qu’ils empruntent puis sont réassemblés à l’arrivée pour former l’information d’origine..
Ce sont ces paquets qui contiennent l’adresse IP du destinataire et celle de l’expéditeur ainsi qu’un ensemble d’informations nécessaires au bon acheminement de ces paquets sur Internet.
Le protocole IPv6 est la dernière version du protocole Internet.
Contre toute attente, c’est un protocole qui existe et a été validé depuis près de 25 années.
Connaissant les limites d’utilisation et de capacité de l’IPv4 et face à la poussée d’utilisation d’Internet, l’IETF ( Internet Engineering Task Force ) avait anticipé la spécification de ce protocole. Le changement le plus notable est qu’une adresse est composée de 128 bits, contre 32 dans l’IPv4, ce qui permet d’adresser plus de 340 milliards de milliards de milliards d’adresses IP. Certains comparent globalement ce chiffre aux grains de sable sur Terre.
Alors quels sont les avantages de l’IPv6 par rapport à l’IPv4 ? Comment faire la différence entre ces deux protocoles ? Savoir lequel est utilisé par votre matériel, et surtout comment établir une coexistence entre l’IPv4et l’IPv6.
Il est facile de faire la différence entre les deux protocoles juste en voyant une adresse. Nous avons vu précédemment un exemple d’IPv4.
L’IPv6 utilise quant à elle huit groupes de quatres chiffres hexadécimaux donc ( 16 bits par groupe pour faire 128 bits), chacun séparés par deux points (:).
Voici un exemple d’une adresse IPv6 que nous allons décortiquer
2720:0bdb4:0b01:4042:0100:6b4d:d730:43c5 / 64
Préfixe Interface ID
Le préfixe est l’élément commun de toutes les adresses au sein d’un même réseau. Il s’agit de l’adresse réseau ou sous réseau utilisé pour le routage des paquets ( le fournisseur d’accès ).
L’identifiant d’interface caractérise un appareil donné (dans ce préfixe) : c’est-à-dire un équipement / appareil réseau connecté en IPv6. Par exemple avec une carte réseau d’un ordinateur.
Le masque définit la longueur du préfixe en bits, ici 64.
Il existe des versions simplifiées de la notation de certaines adresses, pour enlever certains zéros inutiles. Par exemple l’adresse 2720:00d0:abc0:0009:0000:0000:00ba:1000 pourrait s’abréger en 2720:d0:abc0:9::ba:1000.
Comme évoqué précédemment, la création du protocole IPv6 est une réponse à la pénurie d’adresse IP au sein du protocole IPv4. Sauf qu’en réalité, il joue aussi un rôle majeur dans le routage des paquets sur les réseaux informatiques.C’est une autre évolutions fondamentales par rapport àl’IPv4.
En effet, de plus grandes plages d’adresses permettent une meilleure agrégation des préfixes IP de manière à réduire leur nombre. En IPv4, on parle d’un problème majeur de fragmentation des réseaux (à ne pas confondre avec la fragmentation des paquets de données sur le réseau). Les opérateurs ou les entreprises ayant plusieurs adresses ou plages d’adresses IPv4 “possèdent” souvent une multitude de petits réseaux (petites plages d’adresses IPv4 discontinues), ce qui augmente les tables de routages et la complexité générale de l’Internet en IPv4.
IPv6 a aussi apporté une simplification des entêtes des paquets de manière à rendre leur traitement plus rapide et plus efficace par les routeurs.
Enfin, nous parlions tout à l’heure d’IPv4 privées pour parer au nombre limité d’IP publiques. Avec IPv6, même si le concept d’IP privée existe aussi, chaque appareil en IPv6 pourrait “voir” (être directement routable) n’importe quel autre appareil en IPv6. Cette différence peut être vue comme une simplification des interconnexions entre réseaux (par exemple 2 sites d’une même entreprise), mais autant une visibilité directe entre tous les équipements 2 à 2 est possible, autant elle n’est pas souhaitable pour des raisons de sécurité. Une “box Internet” d’une maison en IPv6 continuera d’assurer un peu comme en IPv4 une sorte de point de passage obligé pour atteindre le réseau (public) qui est derrière : vos équipements en IPv6. On parlera de délégation de préfixe (votre box devient un routeur – et firewall – pour le préfixe qui vous est affecté). Qui voudrait voir son frigo connecté en IPv6, ou son ordinateur ou son imprimante directement visible sur Internet sous prétexte qu’elle a une IPv6 publique ?
Alors que manque-t-il pour que tout le monde adopte IPv6 et que la transition se fasse, réglant ainsi certains problèmes parfois coûteux d’IPv4?
Pour permettre une transition de l’IPv4 vers l’IPv6, une solution simple a été créée pour assurer la compatibilité avec l’existant en ’IPv4 : cette solution est le dual stack. Un équipement en dual stack gère les 2 versions d’IP et discute indifféremment avec l’un ou l’autre, pourvu que l’équipement en face soit aussi dans la même version IPv4 et/ou IPv6. Actuellement, toutes les versions de systèmes d’exploitation de nos téléphones et autres ordinateurs sont compatibles dual-stack et vous utilisez déjà sans le savoir IPv6 (sauf si votre fournisseur d’accès ne l’a pas rendu possible ou désactivé par défaut).
Mais cette transition ne sera possible que si tous les équipements sont compatibles – ce qui est globalement le cas – mais surtout si les entreprises ont les compétences et le temps de mettre en place cette dual-stack (donc maintenir certaines infrastructures 2 fois). Une société qui ne serait qu’en IPv6 aurait à l’inverse certains soucis à l’heure actuelle, même si des “passerelles” existent entre les 2 mondes.
De puis 25 ans, l’adoption d’IPv6 se fait lentement mais sûrement, au rythme fixé par les opérateurs notamment, qui se sentent plus ou moins concerné par le sujet.
Et si vous aviez envie de surfer avec une adresse IPv6 ? il vous suffit juste de vérifier votre compatibilité ; sachant que l’activation est automatique sur les systèmes d’exploitation comme Windows ou Linux, il ne vous reste plus qu’à vérifier celle de vos appareils et de votre box. Vous pouvez voir si en l’état vous utilisez IPv6 en allant sur des sites qui testent vos communications dans ce but : https://ipv6-test.com/ par exemple. Sachez que si vous êtes en dual-stack et qu’une ressource (un site web, un jeu en ligne…) est disponible aussi en IPv4 et IPv6, votre système d’exploitation privilégiera IPv6.